Les infrastructures des marchés financiers entre stabilité et innovation

Thomas Jordan, président de la Direction générale

Sibos 2016, Genève, 26.09.2016

Les infrastructures des marchés financiers jouent un rôle essentiel pour diverses tâches de la Banque nationale suisse (BNS), dont la mise en oeuvre de la politique monétaire. Les avancées fulgurantes que connaît actuellement la technologie financière toucheront aussi ce domaine de la finance. Les innovations technologiques revêtent donc aussi pour la BNS une grande importance. Dans ce contexte, il est primordial à la fois de conserver des conditions d'ensemble stables et de favoriser les innovations utiles.

Les fonctions fondamentales du secteur financier - financement des investissements, placement du patrimoine, conservation des titres et exécution des paiements - demeurent inchangées dans l'ensemble. Ce qui change est la manière dont ces prestations sont proposées. Le défi que doivent relever les instances de réglementation et les banques centrales est de comprendre correctement et suffisamment tôt les conséquences, tant positives que négatives, des nouvelles technologies. Les instances de réglementation et les banques centrales sont tenues, d'une part, de garantir la sécurité des infrastructures des marchés financiers et, d'autre part, d'en promouvoir l'efficacité.

Jusqu'à récemment, les infrastructures des marchés financiers se caractérisaient par une tendance à la centralisation. Le progrès technologique pourrait désormais entraîner une décentralisation. Dans ce contexte, on parle souvent des registres distribués (distributed ledger) et de la blockchain. Néanmoins, les infrastructures centralisées des marchés financiers, qui opèrent à bas coûts tout en assurant une grande sécurité, garderont leur légitimité. On peut toutefois imaginer qu'à l'avenir, les nouvelles technologies coexisteront avec les technologies conventionnelles, voire qu'elles soient combinées. Ces nouvelles technologies revêtent une importance particulière pour les banques centrales dans le débat actuel portant sur la possibilité d'émettre la monnaie de banque centrale à l'aide de registres distribués. Ce sujet soulève toutefois de nombreuses questions afférentes aux banques centrales et à leur politique, qui doivent être examinées plus en détail. La BNS suit et analyse avec attention les avancées de la technologie, et entretient des échanges réguliers avec les participants aux marchés, les instances de réglementation et d'autres banques centrales.

D'autres développements touchent cependant d'ores et déjà les infrastructures des marchés financiers et, partant, la BNS. Les systèmes de paiement sans numéraire, dont la Banque nationale facilite et assure le bon fonctionnement conformément à son mandat, en constituent un bon exemple. Aussi, le système de paiement Swiss Interbank Clearing (SIC), dont la gestion stratégique relève de la BNS, a été remanié en profondeur, et la nouvelle génération de ce système a été mise en service en avril 2016. L'intégration d'une norme novatrice pour les échanges de données et l'adaptation des horaires d'exploitation du système SIC, prévue pour l'année prochaine, constituent des conditions importantes à l'introduction d'innovations qui bénéficieront en fin de compte aux clients particuliers et commerciaux.

Les changements adoptés par les infrastructures des marchés financiers sont en mesure de s'imposer s'ils convainquent à la fois les participants aux marchés, les instances de réglementation et les banques centrales quant à leur sécurité et à leur efficacité. C'est pourquoi le dialogue est indispensable entre ces acteurs.