Financement d’hypothèques: titrisation et lettres de gage à la lumière de la crise financière

Thomas Jordan, membre de la Direction générale

Generalversammlung der Pfandbriefbank Schweizerischer Hypothekarinstitute, Zofingen, 15.05.2008

Le financement d’hypothèques focalise les discussions sur les causes de la crise financière internationale. L’extension massive des crédits aux Etats-Unis, notamment dans le domaine des hypothèques subprimes, a prolongé et renforcé la bulle sur le marché immobilier américain. A partir du milieu de 2007, les produits financiers reposant sur des hypothèques subprimes ont subi de fortes dépréciations, ce qui a entraîné des pertes élevées dans les banques et chez les investisseurs. Les problèmes liés à ces produits financiers ont déclenché des discussions quant à l’avenir du financement d’hypothèques. Dans ce domaine, on court le risque d’embrouiller les problèmes des différents instruments et de se tromper sur l’utilité économique de ces derniers.

Trois types d’instruments de financement peuvent être distingués: les lettres de gage, les mortgage-backed securities (MBS) et les produits structurés titrisés. Ces trois instruments ont en commun le fait qu’ils permettent et facilitent le financement d’hypothèques. Mais ils diffèrent en ce qui concerne le transfert du risque. Alors que, dans le cas des lettres de gage, le risque de crédit reste chez les banques, il est transféré aux investisseurs quand il s’agit d’un financement au moyen des MBS ou des produits structurés titrisés.

De graves problèmes qui sont apparus dans les produits structurés reposant sur des hypothèques subprimes ont toutefois mis brusquement fin, au milieu de 2007, au boom de la titrisation. Les principales critiques qu’on a pu formuler à l’égard de la pratique en matière de titrisation sont les suivantes: fausses incitations, mécanismes de contrôle insuffisants, déficiences dans les systèmes de notation, sens de la responsabilité individuelle pas assez développé chez les investisseurs. Il convient maintenant de combler ces lacunes afin de restaurer la confiance des opérateurs dans ces produits. Une interdiction de la titrisation des hypothèques serait toutefois inopportune, car ces instruments de financement permettent d’atteindre un niveau élevé d’efficience économique et il serait inconcevable de les exclure de l’actuel système financier.

Les lacunes apparues dans la titrisation d’hypothèques à la suite de la crise financière ne concernent pas les lettres de gage suisses. Ces dernières devraient donc pouvoir jouer à l’avenir, en Suisse, un plus grand rôle dans le financement, à l’échéancier approprié, des hypothèques. En outre, les banques peuvent encore améliorer leurs liquidités en détenant elles-mêmes des portefeuilles de lettres de gage suisses. En cas de besoin, celles-ci peuvent être utilisées sur le marché interbancaire en francs ou converties rapidement et simplement en liquidités grâce à des opérations de pensions de titres.