Quelle politique de placement à l'ère des réserves de devises élevées?

Andréa M. Maechler, membre de la Direction générale

Apéritif "Marché monétaire", Zurich, 31.03.2016

Depuis 2008, le total du bilan de la Banque nationale suisse (BNS) a été multiplié par six. Cette progression découle de mesures de politique monétaire visant à lutter contre la fermeté excessive du franc. Depuis le printemps 2009, les mesures mises en œuvre comprennent également des interventions sur le marché des changes. La BNS a ainsi fait absorber par son bilan le risque de change que le secteur privé ne voulait plus supporter.

La BNS gère ses placements de devises de manière efficace et professionnelle. Son processus de placement et de risque est structuré de manière similaire à ceux des gestionnaires de fortune. Mais à la BNS, les exigences de la politique monétaire priment toujours la politique de placement. La Banque nationale accorde une grande importance à la liquidité et à la sécurité de ses placements. Afin de maintenir à long terme la valeur en francs de ses placements en termes réels, la BNS s'expose de manière ciblée à des risques de marché. Grâce à la diversification des placements, ces risques sont répartis aussi largement que possible.

Les fluctuations de cours de change sont le principal risque pesant sur les placements de devises. Pour des raisons tenant à la politique monétaire, la BNS ne couvre pas ses placements de devises contre ce risque. Le volume élevé de ces placements a pour conséquence que des fluctuations minimes de cours de change ont des répercussions considérables sur le résultat des placements. Aussi est-il essentiel que la BNS puisse constituer des provisions suffisantes lorsque ce résultat est positif.

La gestion de son important portefeuille d'actions place la BNS devant des questions d'éthique et de gouvernement d'entreprise. Celle-ci applique des critères d'exclusion et renonce à acquérir les actions de certaines entreprises. L'année dernière, elle a, pour la première fois, fait usage de ses droits de vote dans des entreprises à moyenne ou à grande capitalisation de la zone euro.

La liquidité du marché des obligations d'entreprises s'est dégradée, ce qui a amené la BNS à adapter la gestion de ses portefeuilles. En revanche, le marché des obligations d'Etat de bonne qualité reste très liquide. L'horizon de gestion des placements de la BNS étant le long terme, celle-ci n'est pas touchée par les fluctuations des prix à court terme, comme celles de plus en plus fréquentes depuis quelque temps, y compris sur les marchés importants.

Indépendamment du volume des placements, le bas niveau des taux constitue un défi particulier pour tous les investisseurs. Il s'agit là d'un phénomène mondial, et la Suisse ne peut pas y échapper. Le taux d'intérêt négatif prélevé sur les avoirs à vue à la BNS constitue, dans ce contexte, un important instrument de politique monétaire. Sans cet instrument, le franc serait encore plus fort, ce qui aurait des conséquences défavorables tant sur la croissance que sur l'inflation en Suisse. Le second élément de la politique monétaire de la BNS est la disposition de celle-ci à acheter au besoin des monnaies étrangères contre des francs sur le marché des changes. La politique monétaire demeure par conséquent expansionniste.