Place bancaire suisse: un passé prestigieux; un avenir florissant?

Thomas Jordan, président de la Direction générale

Swiss International Finance Forum, Berne, 20.05.2014

L'histoire nous enseigne qu'une place bancaire d'importance mondiale peut aussi se développer dans un petit pays. La Suisse illustre parfaitement ce constat. En effet, son secteur bancaire a atteint, au fil du temps, un poids macroéconomique supérieur à la moyenne. D'une part, cette évolution tient au fait que les banques fournissent des prestations financières à l'économie hautement développée de notre pays. De l'autre, elles créent de la valeur brute par l'exportation de leurs services, les activités transfrontières de gestion de fortune constituant à cet égard une source majeure de revenus. De surcroît, les deux grandes banques suisses jouent un rôle notable dans les activités de banque d'investissement à l'échelle internationale.

La position dominante de la place bancaire suisse au niveau mondial a toutefois été davantage critiquée ces dernières années. L'attitude des banques avant et pendant la crise, ainsi que les interventions inévitables de l'Etat ont en partie entamé le soutien de la population et des responsables politiques dans notre pays. La question de savoir si un secteur bancaire de grande ampleur et d'envergure internationale constitue un bienfait pour la Suisse ou, au contraire, un facteur de risque a ensuite été soulevée de plus en plus souvent. Ces doutes sont en outre alimentés par le fait que la gestion de fortune transfrontière des banques suisses a subi un fort préjudice au niveau de sa réputation à la suite des divers cas d'assistance active à la soustraction fiscale qui ont été dévoilés.

Il reste dans l'intérêt économique de la Suisse de disposer d'une place bancaire puissante et d'importance mondiale. Afin qu'un pays relativement petit comme le nôtre puisse, à l'avenir, continuer d'héberger une telle place, les banques doivent satisfaire à trois exigences: elles se doivent, premièrement, d'offrir des prestations supérieures à la moyenne, deuxièmement, d'être plus résistantes aux crises que la moyenne et, troisièmement, de jouir d'une réputation meilleure que la moyenne.

Les responsables politiques et les autorités sont eux aussi sollicités. Ils doivent s'employer à créer un cadre favorable. Quatre facteurs sont particulièrement importants à cet égard. Il importe, en premier lieu, de veiller à atténuer la problématique du too big to fail par une réglementation compréhensible et efficace; en deuxième lieu, de préserver la bonne réputation de la Suisse en tant que pays stable sur les plans politique et économique; en troisième lieu, de mettre en place un dispositif qui permettra de garantir la protection de la sphère privée des clients bancaires étrangers respectueux de la législation fiscale, et ce même dans le cadre de l'application de normes internationales sur l'échange automatique d'informations; et en dernier lieu, d'instaurer, de concert avec les autorités et les régulateurs à l'étranger, des mesures accordant aux banques suisses l'accès aux marchés internationaux.