Les banques centrales en action: turbulences sur les marchés financiers et mesures de politique monétaire

Thomas Jordan, membre de la Direction générale

36th General Assembly Association of Foreign Banks in Switzerland, Genève, 06.06.2008

La crise des marchés financiers a engendré d'énormes tensions sur les marchés monétaires et confronté les banques centrales à des défis complexes. Ces dernières ont réagi à la nouvelle donne en utilisant avec souplesse et en élargissant la panoplie de leurs instruments, ce qui leur a permis d'enrayer une propagation de la crise. Malgré toutes les mesures prises en ce sens, les tensions subsistent sur les marchés monétaires. Les mesures des banques centrales ne suffisent pas à dissiper le manque de confiance sous-jacent. Seuls les intervenants sur les marchés financiers sont à même, en définitive, d'en venir à bout.

S'agissant de ces mesures, plusieurs enseignements peuvent être tirés de la crise: dans le cadre de leurs efforts visant à assurer la stabilité des marchés financiers, les banques centrales ne s'en tiennent pas à la seule adaptation du taux directeur, mais disposent de tout un arsenal d'instruments de gestion des liquidités. Elles doivent être en mesure d'injecter temporairement de grosses quantités de liquidités sur le marché et également de les résorber. En outre, elles doivent pouvoir mener des opérations avec le plus grand nombre possible de contreparties, et ce, contre un large cercle de garanties et pour différentes durées. Une facilité permanente n'est utile que si le recours à cette dernière ne donne pas cours à une stigmatisation excessive. Les accords de swaps (collateral swaps) constituent un moyen efficace d'augmenter les liquidités au sein du système bancaire sans entraîner un accroissement de la monnaie centrale. Cependant, il ne faudrait y recourir qu'à titre exceptionnel. Par ailleurs, la crise a également souligné l'importance de détenir un socle suffisant de réserves de devises pour garantir la stabilité des marchés financiers.

Les mesures prises par les banques centrales pourraient toutefois aussi avoir un coût: des interventions dictées par le souci de garantir à court terme la stabilité du système financier peuvent encourager à long terme le risque moral (moral hazard) et, par conséquent, représenter un nouveau risque pour les marchés financiers. Deuxièmement, ces interventions peuvent attiser l'inflation. Ainsi, la politique monétaire est non seulement mise à l'épreuve sur le front de la stabilité des marchés financiers, mais également sur celui de l'inflation dont elle se doit d'observer l'évolution avec la plus grande attention.